helmut newton






Woman and Gardener,
Lake Como, Italy, 1979.
Le titre de cette photo d'Helmut Newton nous renseigne sur les deux sujets principaux, que le premier coup d'œil suffit à identifier. Mais ce titre paraît trop simpliste. Que cache-t-il ? La femme et le jardinier ne sont pas seulement mis côte-à-côte dans un cadre : il se passe quelque chose entre eux.

Lui. Il semble tout à sa tâche, mais ne regarde pas son geste. Sous son chapeau, il regarde la femme. Il est doublement équipé. D'une faux et d'une serpe. Deux symboles phalliques. Le geste du faucheur, ample, répétitif, coupant dans l'herbe tendre, peut assez facilement se lire comme une métaphore de l'acte sexuel. Au premier plan, l'avant-bras en plein effort suggère la virilité du jardinier, suggestion renforcée par la statue nue et musculeuse juste devant lui.


Elle. En plein mouvement elle aussi. Sophistiquée, cheveux courts, coiffés, collier, l'attitude volontaire, elle semble danser, comme en tutu. Simplement, sa robe n'est pas dessinée comme un tutu. Elle la soulève volontairement, pour se découvrir le plus largement possible. Tout en légèreté, dans son étoffe virevoltante, elle ressemble aux papillons imprimés sur sa robe.


Que découvre-t-elle ? Ses jambes, en bas noirs, son entre-jambe, quasiment invisible sur fond de végétation. Seuls son visage et ses doigts sont nus. Son mouvement, penché vers le jardinier, évoque un envol ou une attirance. Un de ses pieds sort du chemin de sable blanc bordant le château. Il est déjà sur le gazon, territoire du jardinier.


Entre les deux. La femme et le jardinier se trouvent dans le parc d'un château. On pense qu'elle le possède et qu'il y travaille. Exactement au centre de la photo, à l'arrière-plan, deux arbres les séparent.



Sur la moitié côté homme, on observe deux colonnes érigées à l'arrière-plan, la statue de l'Hercule. Sur la moitié côté femme, on voit des massifs de fleurs au pied de la villa. On peut aussi remarquer, au loin, une statue, sur fond d'arbuste. Difficile à distinguer, mais les hanches et la posture alanguie suggère une statue de femme. Et les deux statues se regardent à distance, comme une mise en abyme de la relation entre la femme et le jardinier.



Voilà ce qu'on voit. Ensuite, on peut interpréter.
Soit du côté sensuel : un passage à l'acte proche, annoncé par l'érotisme de la femme qui se dévoile en restant cachée, par la virilité du jardinier, par la nudité des statues. Et par l'imaginaire de cette relation souvent traité en art (Chatterley...)
Soit du côté inverse : une relation impossible, symbolisée par les statues qui se voient mais ne pourront jamais se rapprocher.

Marcel